Prendre une pause, écrire moins, écrire mieux

Dans la dernière année, j’ai beaucoup réfléchi à la quantité de livres que j’écris et publie. J’ai augmenté le nombre de mes animations scolaires sans réduire mon rythme d’écriture, et le plaisir d’écrire en a souffert. J’ai donc pris deux décisions :

La première : prendre une pause.
J’ai vu des amis abandonner l’écriture par éreintement complet, et je n’ai pas envie que ça m’arrive. J’ai souvent pris des pauses pendant l’été, enfants obligent, mais j’étais alors rongée par la culpabilité. Je me donne donc, cette fois, la permission de ne pas écrire DU TOUT pour tout le mois de juillet. Vacances complètes. Je vais lire, jouer aux jeux vidéo, faire des activités en famille, et regarder passer les nuages.

La seconde : prendre mon temps pour mon prochain roman.
Le prochain roman dans l’écriture duquel je vais me plonger en est un que je qualifierais d’important. C’est une histoire qui me trotte en tête depuis plus d’un an et je n’ai pas envie de me presser à l’écrire. Je prendrai donc un mois complet à la suite de mes vacances pour faire des recherches, réfléchir à mon plan et bâtir mon univers tranquillement. J’ai des films que je désire revoir, des livres et des bandes dessinées que je veux lire, des idées éparses à mettre sur papier.

Je ne commencerai l’écriture qu’une fois les enfants retournés à l’école en septembre, et je travaillerai ce roman jusqu’à ce que je sois satisfaire de chaque ligne. Ça prendra le temps que ça prendra.

En espérant que le résultat sera à la hauteur.

Écrire quand on a une mémoire de poisson rouge

Illustration de Andrea Stöckel prise sur publicdomainpictures.net Tous ceux qui me connaissent le savent : ma mémoire est une véritable passoire! Je suis incapable de retenir un numéro, et le moindrement qu’une information m’ait été dite il y a longtemps, il y a une chance sur deux pour que je ne m’en souvienne pas. Comme dit le vieil adage : j’oublierais ma tête si elle n’était pas attachée.

Le problème, c’est que la mémoire est essentielle en écriture. Surtout pour les séries, et encore pire lorsqu’on bâtit des mondes fantastiques ou de science-fiction. Je viens juste de terminer le deuxième tome de Les Abysses, et voilà comment je m’en suis sortie.

1er truc : écrire une bible.

J’ai découvert l’idée des bibles lorsque j’ai fait des jeux vidéo à partir de séries d’animation. Ce sont des documents qui existent surtout pour les séries télévisées, pour lesquelles plusieurs scénaristes différents devront écrire des histoires. On y retrouve des fiches de personnages (autant principaux que secondaires), les noms des lieux et leurs relations géographiques, et toute autre information importante. Quelques exemples qui se trouvent dans ma bible de Les Abysses :

  • Le fonctionnement des implants et du Skompe qui les alimentent
  • L’étage où se situe chaque lieu
  • Les différentes races et leurs caractéristiques
  • L’âge de chaque personnage (que j’oublie sans cesse!)

Dans le meilleur des mondes, ce document s’écrit en amont, avant que le moindre chapitre ait été écrit. Personnellement, je le remplis au fur et à mesure de ma PREMIÈRE RÉVISION. Ce qui veut dire que j’écris un premier jet à l’aveugle, au mieux de ma mémoire déficiente, et c’est lors de la première relecture que je copie-colle les informations utiles dans la bible de la série. Petit bonus : mon éditrice aime bien que je lui envoie le document en question pour l’aider à s’assurer de la continuité de mon univers.

2e truc : laisser des trous

Lorsque j’écris le premier jet d’un tome subséquent, me référer sans cesse à ma bible m’arrête dans mon élan d’écriture. J’ai donc pris l’habitude de laisser des trous (inscrits XXXXXX) pour les petits détails dont je ne me souviens plus. On trouve donc ce genre de phrase dans mes premiers jets :

Encore une fois, c’est lors de la première relecture que je comblerai les trous avec les informations contenues dans ma bible de série.

3e truc : me laisser des notes avant d’arrêter d’écrire

Comme bien des distraits, je suis capable de moments de grande concentration pendant lesquels je réussis à tenir une bonne quantité d’information dans mon cerveau. Malheureusement, tous ces fils auront été échappés avant le lendemain matin. J’utilise donc les cinq dernières minutes de mon temps d’écriture pour prendre des notes sur ce que je m’apprêtais à faire. La plupart du temps, je dresse une liste des éléments essentiels au prochain chapitre, mais il m’arrive également d’indiquer une modification importante que je devrais faire dans ce qui est déjà écrit. Ça me sauve du temps de réflexion lors du début de ma prochaine séance d’écriture, et m’évite les oublis narratifs!

Tricoter ou détricoter?

Je suis en révision du tome 2 des Abysses et, par deux fois, j’ai « détricoté » un chapitre. Je m’explique.

J’adore alterner entre deux scènes de manière rapide à l’intérieur d’un même chapitre. C’est ce que j’appelle « tricoter ».  Je trouve que ça rehausse l’action et que ça maintient le lecteur en haleine. Pourquoi décider d’éliminer le procédé dans deux de mes chapitres, alors? Parce qu’avec l’expérience, je réalise qu’il n’a pas toujours sa place.

Quand l’utiliser :
L’alternance de scène est fantastique lorsque les deux scènes sont dépendantes une de l’autre et que l’une d’elles aura une influence sur le dénouement de l’autre. Par exemple, alterner entre des personnes qui tentent vainement de se sauver d’une maison en feu et les pompiers qui arrivent. C’est parfait.

Quand l’éviter :
Quand deux scènes n’ont aucune influence l’une sur l’autre, même si elles sont simultanées. Par exemple, si j’en reviens à ma maison qui brûle, imaginons qu’il y ait eu un accident de voiture à l’autre bout de la ville au même moment. Les deux événements ont beau être simultanés, ils restent indépendants.

Bref, c’est un procédé que j’adore, mais j’apprends aussi à ne pas en abuser!

Les inspirations derrière Les Abysses

Découvrez quelles sont les inspirations derrière mon dernier Roman, soit Les Abysses T1 : La mine.

Inspiration globale : The Maze Runner, de James Dashner

Excellent roman pour adolescents, j’adorais l’idée d’un livre dans lequel le personnage principal lui-même ignore dans quelle microsociété louche il vient d’atterrir et découvre les règles en même temps que le lecteur. D’ailleurs, dans ce roman aussi, le voyage du protagoniste commence dans un ascenseur.

Inspiration pour les Lorkistes: Dark Crystal et Agent of Shield

Du premier, j’ai pris l’aspect un peu inquiétant et la hiérarchie que l’on retrouve chez les Skeksis.

Par contre, je ne voulais pas leurs habitudes barbares si bien démontrées dans la scène du repas. Au contraire, je suis allé chercher le raffinement des Kree, sorte d’extra-terrestres à la peau bleue, dans la cinquième saison de la série télévisée Agent of Shield.

J’aime ce contraste d’idéologies barbares cachées sous un vernis de retenue civilisée. Les difficultés rencontrées avec la notaire lors de la succession de ma mère sont venues compléter le tout avec un côté bureaucratique très rigide.

Inspiration pour l’univers des Abysses : Books of Babel et Traboulidon

J’avais envie, avec Les Abysses, d’avoir un terrain de jeux pour mon imaginaire! Un endroit dans lequel je pourrais construire plusieurs micro-univers différents qui partageraient un même espace… comme les étages de la tour de la série Books of Babel, une de mes séries de romans préférées des dernières années, ou encore comme dans Traboulidon, émission jeunesse de mon enfance dans lequel chaque épisode nous transportait dans un endroit complètement différent.

Les Chroniques sur le Squat! 

Le Squat est la plate-forme jeunesse du site internet de Télé-Québec. Ils ont récemment commencé un club de lecture audio et le livre Chroniques post-apocalyptiques d’une enfant sage est le premier titre choisi! Depuis déjà un mois, et jusqu’au 30 juin, de multiples animations et contenus sont offerts autour du roman. Petit tour d’horizon de ce que vous pouvez y découvrir:

Les activités devraient continuer tout le long du mois!

Ce que je trouve le plus fantastique? Voir tous ces jeunes activement impliqués dans la lecture en dehors de l’école! Longue vie au Club de lecture du Squat!

 

À mes élèves préférés

Mon année d’animations est terminée, et j’en profite pour rendre hommage aux élèves qui rendent ces visites fantastiques!

L’expressif : L’élève dont le visage reflète jusqu’à l’exagération chaque émotion ressentie. Ses yeux s’écarquillent à la moindre information inusitée, il se tape sur les cuisses à la moindre pointe d’humour. Merci, tu me donnes l’impression d’être la personne la plus intéressante au monde!

Le petit tannant : Oui, je sais, s’il y en a plusieurs dans une classe, ou qu’on vit ses interventions en permanence depuis des mois, il peut rendre le travail de professeur pénible. Mais moi, qui ne les croise qu’une heure chacun, je les aime! Leurs interventions inopinées m’amusent, me gardent à l’affût, m’empêchent de réciter toujours la même cassette d’une classe à l’autre. Merci, tu me fais sortir le meilleur de moi-même.

Le créatif : L’élève grâce auquel la simple histoire de joueur de soccer qui se casse une jambe prend une tournure inattendue avec l’ajout de superpouvoirs, de requins volants ou de patate mutante. Merci, rien ne me fait plus plaisir que d’être surprise par une histoire. Tu repousses la monotonie, et fais naître des moments de magie.

Le charismatique : Il y a parfois des élèves sur lesquels les yeux s’arrêtent systématiquement lorsque l’on balaie la salle du regard. Des yeux perçants, des cheveux épiques, une dent croche, un choix vestimentaire osé, un petit détail qui fait qu’on aurait envie de le regarder toute la journée. Merci, comme une œuvre d’art, tu me touches.

Le brave : Le seul à oser lever sa main dans une classe complète de poissons morts. Celui qui se moque bien du jugement de ses camarades et ose se montrer intéressé. Tu es celui que je remercie le plus! Tu me sauves l’humiliation de poser une question et de devoir y répondre moi-même.

Le timide : Il y a parfois des élèves qui ne disent pas un seul mot de toute la présentation, qu’on remarque à peine… et soudain, une fois l’animation terminée, ils font un détour jusqu’à l’auteur pour souffler un « merci », oser poser une question ou même m’offrir un câlin. Merci, c’est pour toi que je suis venue, c’est ton petit effort contre nature qui me confirme que ma présence aura servi à quelque chose.

Le brillant : Chaque classe en a au moins un : un élève qui a toujours la bonne réponse! Celui sur qui tu peux compter lorsque, après avoir donné la parole à trois autres, tu te désespères de pouvoir passer à autre chose. Merci pour ta vivacité d’esprit, j’ai hâte de voir ce que tu en feras en vieillissant!

Bon été à tous les professeurs et élèves, mon calendrier s’ouvrira le 25 août pour une prochaine année d’animation!

À Vancouver, juste parce que!

Il fut un temps où j’acceptais les tournées scolaires un peu plus loin de chez moi pour des raisons monétaires. Ces dernières m’assuraient quelques journées d’animations, soit un supplément de revenu plutôt bienvenu. Je suis allée dans les Maritimes, à Gatineau, sur la Côte-Nord, et j’en passe. 

Depuis la pandémie, mon calendrier d’animations se remplit avec les écoles de Montréal et de ses environs. Je dois moi-même choisir le nombre de journées que j’y consacre, et refuser les demandes supplémentaires. Dans la foulée, j’ai arrêté les tournées en régions. Pourquoi en faire, alors qu’elles sont beaucoup plus compliquées pour ma gestion familiale, et que plusieurs offrent des tarifs bien en dessous de celui des animations standards (pas toutes, mais certaines!). Il y a la question écologique, aussi. Bref, tout mon rationnel me disait que c’était la bonne décision. 

Mais voilà, ça me manquait. 

Aller rencontrer des jeunes de partout, voir de nouveaux paysages, me sortir de ma routine, reste un des côtés fantastiques de mon métier. J’ai vécu certains de mes plus beaux souvenirs d’autrice durant ces tournées. 

Alors, cette semaine, je suis à Vancouver (plus précisément à Coqulitam), pour la simple raison qu’on m’y a offert une tournée et que j’ai été prise d’une grande envie d’y aller! 

Je n’ai pu trouver aucune autre raison valable que “ça me tente”. Il faut croire que, parfois, c’est une raison suffisante. 

La dictée P.G.L.

Avoir les Éditions Druide comme éditeur donne parfois accès à de drôles de choses, comme une conversation avec Bertrand Gauthier et Louise Portal, la présence de certaines phrases de tes romans dans Antidote, et une version gratuite du logiciel en question.

Dans les derniers mois, ils m’ont offert une opportunité un peu spéciale : ils m’ont demandé d’écrire le texte de la grande finale du primaire de la dictée P.G.L.

Pour ceux qui ne connaissent pas l’événement, il s’agit d’un grand concours d’orthographe organisé à travers la francophonie par la Fondation Paul Gérin-Lajoie. Les écoles participantes choisissent un seul élève qui participera à la finale régionale, et les gagnants de ces régions se retrouvent à la grande finale à l’UQAM. On y trouve des jeunes de partout au Canada, et même du Sénégal, du Maroc et de la Côte d’Ivoire.

La dictée a été télévisée et est disponible sur YouTube! Si vous voulez vous y essayer, cliquez le lien ci-dessous.

Le ministre Bernard Drainville lit la dictée à partir de la 42ème minute, et le corrigé de l’équipe d’Antidote devrait apparaître sur le site de la fondation au courant de la journée.

Sachez que la grande gagnante a fait un sans-faute!

À vos crayons, et bonne chance!

L’Eurovision, la déception, la société et moi.

Je suis une grande amatrice du concours de chants Eurovision, que nous écoutons en famille depuis maintenant cinq ans, soit depuis l’année où l’Israël a gagné avec la chanson « Toy » de la chanteuse Netta.

samedi dernier, c’est la Suède qui a gagné, mais je n’ai pas envie de parler de victoire. J’ai envie de parler de défait, de déception, et surtout du regard de la société sur ces choses… même pour les auteurs.

Cette année, la France était représentée par une Québécoise appelée La Zarra pour le concours Eurovision. Après s’être fait dire par tous qu’elle avait de fortes chances de se classer parmi les cinq premières positions (avec raison, sa chanson était excellente!!), elle s’est plutôt retrouvée au 16e rang. On l’a alors vu faire un geste de déception, soit un toz qui ressemble à une version élégante d’un doigt d’honneur, puis quitter prestement les lieux.

Évidemment, les réseaux sociaux se sont emparés de ces infos. Tout Twitter ne parlait plus que de ça. Ça m’a rappelé comment les caméras scrutent les visages de candidats perdants aux oscars, à la recherche de la moindre moue. Ça m’a rappelé surtout comment moi-même, déçue que La Légende de Paul Thibault n’ait été en nomination pour aucuns prix lors de la saison 2021-2022, n’ai pas osé en parler sur les médias sociaux ni sur ce blogue, dans lequel je partage pourtant volontairement mes moins bons coups.

Conclusion : ce n’est pas honteux de perdre, mais c’est honteux d’être déçu, une émotion pourtant tout à fait normale. Je ne suis pas certaine de ce que cela dit sur notre société.

Pour balancer les choses, je vous avoue donc finalement ma déception que La légende de Paul Thibault n’ait remporté aucune nomination. Je trouvais que c’était un album spécial, pour l’écriture duquel je m’étais surpassée. Je sais très bien que ces reconnaissances ne sont pas nécessaires à la vie du livre… mais je suis déçue quand même, na!

Voilà, c’est dit.

Le problème avec les bonnes lectures…

Dans les derniers mois, j’ai eu droit à des recommandations de lectures de deux véritables expertes en littérature jeunesse, soit Sophie Gagnon (de Sophielit.ca) et Catherine Chiasson (de la librairie Le Renard Perché). Les deux ont des goûts impeccables et connaissent mes préférences, j’ai donc eu le plaisir de lire plusieurs livres jeunesse d’une qualité exceptionnelle les uns à la suite des autres. Les voici:

Vous direz : quelle chance, c’est merveilleux!

Il est vrai que lire un ou deux très bons livres est excellent pour l’inspiration et la motivation d’un auteur. On remarque que les personnages sont mieux bâtis que les nôtres ou encore que les mondes sont originaux et on se dit qu’on devrait faire attention à ces aspects pour notre prochain roman.

Mais en lire plusieurs, c’est angoissant. On se compare, on se dit soudain qu’on n’y arrivera jamais et le syndrome de l’imposteur, pourtant tenu efficacement à distance ces derniers temps, revient au galop!

C’est là que je suis rendue cette semaine, alors que je retravaille le deuxième tome de Les Abysses : j’angoisse de ne pas être à la hauteur des auteurs que je lis.

Ça se fait, vous pensez, demander des suggestions de mauvais livres? Il me semble que ça me ferait du bien!