Une révolution : Amazon organise et légitime la fanafiction

Tout d’abord, une petite définition :

Fanafiction : Fiction écrite par un fanatique d’une série télévisée, d’un film ou d’un livre donné, qui en reprend les personnages et l’univers, de façon à créer sa propre histoire. (granddictionnaire.com)

La fanafiction existe depuis belle lurette. Elle pousse habituellement sur les sites d’adeptes de séries télé ou romanesques, bien souvent dans les forums de discussions. Même le fameux « Fifty shades of grey » aurait été, à l’origine, une fanafiction de Twilight qui fut transformé en livre original à des fins de publications. Que les auteurs soient pour ou contre cette appropriation de leur œuvre par les lecteurs, ils n’empêcheront jamais ce style littéraire d’exister, ou du moins, pas sans passer pour des « gros pas fins » ou sans s’armer d’avocats.

Jusqu’ici, la fanafiction a toujours été en marge de l’industrie : les fanatiques n’écrivent que pour le plaisir et ni eux, ni l’auteur original ne bénéficient concrètement de ces oeuvres périphériques.  Amazon a lancé, la semaine dernière, une nouvelle application qui pourrait bien changer tout ça! L’article « Amazon Launches Kindle Worlds Store, Its Self Service Platform For Fan Fiction Authors » de readwrite en parle, mais en voici les grandes lignes pour les paresseux ou ceux qui ne lisent pas l’anglais :

quelques uns des mondes de Kindle World

Amazon s’est entendu avec quelques créateurs pour qu’ils ouvrent leurs œuvres au public. Les fans peuvent sélectionner un des mondes de ces créateurs, et écrire une fanafiction qui respecte les règles établies par l’auteur. Amazon vérifie la conformité de l’œuvre soumise, puis l’offre au public pour un prix modique. Pour chaque personne qui achète ensuite la fanafiction, Amazon, le fan, ET l’auteur, reçoivent chacun une part du gâteau! (l’éditeur originel aussi peut-être, ça doit dépendre des contrats)

Les réactions dans le milieu seront possiblement mitigées. Certains créateurs aiment garder le contrôle de leur création et feraient de l’urticaire juste à penser que des amateurs pourraient s’approprier leurs personnages. En même temps, la beauté de Kindle World est justement que l’accord de l’auteur doit avoir été donné au préalable.

Personnellement? J’embarquerais à pieds joints! Je me considère comme une bâtisseuse de monde avant tout! J’adore créer des univers, et rien ne me ferait plus plaisir que de voir des histoires surgir à gauche et à droite de manière spontannée. En fait, quand j’ai créé mon encyclopédie pour Boomerang, je rêvais de le rendre « open source », comme certains logiciels informatiques. Je rêvais de pouvoir dire à l’univers en entier de s’approprier ce monde que je créais, à condition d’y créditer mon livre (et mon nom) quelque part. Je pensais alors que l’idée était trop en avance pour l’industrie… peut-être pas tant que ça finalement!!!

Plaisirs et risques du format journal intime

Illustration de Machovka sur openclipart.orgUne des nouvelles formes avec lesquelles j’ai expérimenté lors de la rédaction du cinquième Victor est le journal intime. C’était la première fois que j’écrivais au « je », si on exclut mon propre journal d’ado tourmentée tenu durant mon secondaire deux. J’ai adoré… mais suis tombée dans le piège aussi.

Le plaisir :

Je n’ai jamais été aussi en symbiose avec un personnage. Sa voix parlait directement dans ma tête, je vivais ses émotions, J’ÉTAIS mon personnage. Ça doit être un peu la sensation des acteurs habités par leur rôle : se sortir de soi l’instant d’une scène. Très intense. Je réécrirai certainement au « je » une autre fois.

 

La difficulté :

Comme le journal est non seulement une forme écrite par le personnage, mais écrite au passé (contrairement à un roman écrit à la première personne, mais au temps présent), j’ai trouvé plus difficile de faire naître un suspense, ou encore de surprendre le lecteur. Comme si la forme demandait que la première ligne d’une entrée indique aussitôt l’état d’esprit du rédacteur du journal. On sait tout de suite si le « outcome » des événements racontés sera positif ou négatif et, à moins de coup de théâtre, on sait également qu’il n’est pas mort. Comme j’ai déjà expliqué dans un autre billet, l’absence de possibilité de mort nuit grandement au suspense.

 

Le piège :

J’ai eu tant de plaisir avec mon personnage-narrateur, que j’en ai oublié tous les autres. Le verdict du premier lecteur a été rude (mais juste) : personnages secondaires unidimensionnels. Je suis habituée à sauter d’un point de vue à l’autre et d’ainsi donner vie à tout le monde en dévoilant leurs pensées et leurs manières de voir le monde, mais en restant collé à l’esprit de l’un d’eux, j’ai négligé la personnalité des autres. Même en corrigeant le tout, j’ai trouvé difficile de leur donner de la profondeur tout en gardant le filtre du point de vue du narrateur. Par exemple, si le narrateur détestait un personnage, les phrases qui me venaient en tête sur son compte étaient toutes négatives, sans exceptions. Difficile ensuite de lui donner un peu de ton de gris. Espérons que j’ai tout de même réussi à corriger le tir… la direction littéraire nous le dira!

Une pause créative bien efficace

illustration de laobc prise sur Openclipart.orgIl y a trois mois, j’ai pris la décision de ne pas commencer le deuxième cycle de Victor Cordi, citant entre autres un besoin de faire une pause après quatre livres d’une même aventure écrits en 18 mois. https://www.romanjeunesse.com/2013/03/17/un-changement-de-rythme-dans-victor/ J’ai donc plutôt écrit un recueil de contes d’Exégor, parsemmé d’informations quasi encyclopédiques sur le monde découvert par Victor. Dans les histoires, j’ai exploré différents personnages, et surtout différents styles allant du journal à la fable en rimes.

À travers tout ça, j’ai nourri mon imaginaire de divers livres jeunesse, de livres d’art et magazines de bandes dessinées. J’avais soif de nouveaux mondes, d’idées nouvelles et d’imaginaire.

Résultat?

Depuis deux mois, je bouillonne d’idées! Je sais désormais quel sera le contenu général des quatre livres du prochain cycle, avec une vision précise de la première et dernière scène qu’on y trouvera. Encore mieux, je sais également quelle sera la trame de fond du troisième cycle, scène finale comprise!

Pas assez? J’ai aussi une nouvelle idée de série pour les 7-8 ans! Aucune idée de quand je serai capable de la mettre sur papier, mais qu’importe, j’adore avoir des idées qui macèrent dans un recoin de mon cerveau!

Bref, maintenant que mon tome hors série est complété, je me sens enfin prête à attaquer le cycle 2! Prête? Mieux en fait, j’ai hâte! Vivement septembre (enfin, presque, n’exagérons rien!)

Secrets de Victor #2 : Les noms!

Ici pour voir le secret #1 : Tout le monde tout nu!

Derrière certains des noms dans Victor se cachent de petites anecdotes d’écriture! En voici quelques-unes, en toute exclusivité!

Victor Cordi : Au tout début, mon héros s’appelait en fait Philippe Fontaine. Le nom sonnait bien à mon oreille… jusqu’à ce qu’on me fasse remarquer que c’était, à une syllabe près, le nom d’un chanteur plutôt ringard de ma jeunesse! Le nom devait être resté tapis dans un recoin de mon cerveau, et s’être auto-régurgité lorsque j’ai cherché à nommer mon protagoniste principal. Tous ensemble : Cœur de lou-ou-oup!

Exégor : Choisir le nom du monde dans lequel évoluerai mon héros n’était pas chose facile. Aidée de mon amoureux et de son téléphone, nous avons cogités lors d’un long chemin. Nous avons cherché du côté des mots bretons, puisque le village de Lenta-Oh (Kerr Haven) en avait déjà la consonance. Nous avons ainsi trouvé « Egor » qui signifie « espace » et y avons ajouté le préfixe « ex » pour donner au nom la signification approximative de « À l’extérieur de l’espace ». Parfait pour un monde parallèle au nôtre!

Biscouti : Dans le troisième tome, Victor apprivoise une particelle (petite boule de poil brun-roux) et lui donne le nom de Biscouti. Ce nom est en fait le surnom affectueux de la plus jeune de mes enfants, tiré d’une comptine lue dans un album de Gotlib :

« Leblésmouti
Labiscouti
Ouileblésmou
Labiscou »

 labiscouti

Note : dans le Gotlib en question, on réalise en fait que la comptine devrait se lire : « Le blé se moud-il, L’habit se coud-il, oui le blé se moud, l’habit se coud ». 

Le nouveau contact avec le lecteur

Image par Stellaris sur openclipart.orgDepuis quelques semaines, je reçois des messages de lecteurs, bibliothécaires et parents sur Facebook, et je trouve ça formidable!  « Quand sort le prochain livre? » « Vos livres sont très appréciés » et autres commentaires me remplissent de bonheur. Ils agissent comme autant d’indications que mon livre vit  à l’extérieur de ma tête et de mon ordi!

Étrangement, avec l’arrivée du numérique, certaines personnes se demandent ce qui adviendra de la dédicace. Plus je reçois de commentaires électroniques, moins je m’inquiète pour le sort de la dédicace! Elle sert à faciliter le contact entre auteur et lecteur, et, dans le fond, les médias sociaux font exactement la même chose! Les Salons du livre me serviront peut-être un jour à rencontrer en face à face mes amis-lecteurs rencontrés sur Facebook, comme ils me permettent de le faire avec mes amis-auteurs rencontrés virtuellement durant le reste de l’année. La vente de livre se fera alors tablette en main, en la passant dans le faisceau-caisse de ma maison d’édition, et je signerai des cartes postales de page couverture, que les lecteurs collectionneront et s’échangeront dans la cour d’école! « Attrapez-les tous » version littéraire! Ne serait-ce pas merveilleux?

En attendant, je vais de ce pas voir si mes auteurs préférés n’auraient pas une page Facebook à laquelle m’abonner. Qui sait, j’oserai peut-être même leur laisser un message!

De l’origine des idées et de mon admiration nouvelle pour Alan Snow

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Dans les classes, la question qu’il m’est le plus difficile de répondre, c’est « d’où te viennent tes idées ». Les idées sont des choses qui jaillissent, sans mécanique précise et sans recette secrète pour les faire mousser. Impossible de décrire le processus; un peu comme les souris d’Aristote, c’est de la « génération spontanée ». En fait, la seule bonne réponse entendue à ce sujet était celle de Stéphane Dompierre à l’époque où il était parrain du concours d’écriture de Radio-Canada : « Si tu es obligé de poser la question, c’est que tu n’es pas un auteur » (réponse qui, de toute évidence, ne m’est d’aucune utilité dans les écoles, puisque un peu trop bête-et-méchante pour mon public!).

Bref, je suis une génératrice d’idée, je n’en manque jamais, et je m’incline rarement devant l’imagination des autres. Devant leur verve, souvent, leurs talents de conteurs, parfois, mais au jeu de l’imagination, je ne crains pas grand monde! Lewis Carol, Roald Dahl, Claude Ponti, la liste est courte. Et voilà que la semaine dernière, un nom s’y est ajouté : Alan Snow.

ScreenHunter_01 May. 26 07.47Il est l’auteur des Chroniques de Pont-aux-rats, Ratbridge Chronicles de son nom anglophone original, et il a créé un univers tout à fait original! Des bricoleurs simples d’esprit s’y promènent dans des boites en carton, des braconniers organisent des chasses à court pour capturer des fromages sauvages, et les pirates se recyclent en buandiers offrant livraison à domicile. Chaque personnage est un petit bijou d’inventivité dans cet univers urbain aux facettes multiples.

Cerise sur le gâteau, Alan Snow illustre lui-même le tout, non, mais, c’est pas possible autant de talent dans une seule personne!

Je conseille donc ce livre à tous! Pour les jeunes lecteurs, vous pouvez feuilleter le premier chapitre pour voir le ratio texte-images, je le recommanderais personnellement à de bons lecteurs de 8 ans qui sont tannés de Géronimo.

Note : Si l’épaisseur du premier tome vous fait sourciller, c’est que l’édition française regroupe les quatre premiers livres en un seul recueil, ce qui transforme le tout en belle grosse brique!

De listes, de prix et du syndrome de l’imposteur!

illustration de Mirek 2 pour openclipartDeux bonnes nouvelles de suite! Est-ce que je peux vous avouer que je passe un très, très bon mois de mai!

La liste préliminaire des Prix des Libraires est sortie la semaine dernière et devinez qui se retrouve dans la catégorie Québec 5 à 11 ans ? Eh oui! Mon Victor!!!! J’en ai été excitée toute la semaine!

En plus, j’y suis listée en compagnie de grandes dames de la littérature jeunesse (et même de la littérature tout court) : Dominique Demers, Élisabeth Vonarburg et Lili Chartrand ! Quelles pointures!

Il y avait justement un article sur le fait de gagner un prix dans le dernier Lurelu. Le verdict de tous les anciens lauréats était le même : le plus gros avantage est que ça éloigne le syndrome de l’imposteur pour quelque temps!  C’est comme une grosse tape dans le dos qui fait fuir les doutes en te disant : ça va, tu es à ta place, tu fais du bon boulot!

Ça ne peut certainement pas nuire côté visibilité et côté crédibilité pour les ventes tant locales qu’à l’international non plus! Et comme je m’enligne pour une très longue série avec Victor, le moindre petit coup de pouce pour faire découvrir la série au plus de lecteurs possible est le bienvenu!

La prochaine étape sera le choix des nominés officiels, mais je dois vous avouer que cette simple présence en liste préliminaire me comble déjà de joie!

On se croise tout de même les doigts pour la suite!

Un magazine sur mesure!

illustration de Jammi Evil sur OpenclipartLorsque la relationniste de presse de la Courte Échelle m’a envoyé un courriel pour me dire qu’un magazine québécois désirait faire une entrevue de moi pour mes Victor Cordi, j’étais emballée! Les médias parlent lu le nom du magazine, j’ai vraiment jubilé! Le Coup de Pouce? Non! L’Actualité? Pffff! Le bibliothécaire futé? Ça n’existe même pas!

Mais non! C’est bien mieux que tout ça!

Petit roulement de tambour :

Les débrouillards!

Et pas n’importe laquelle, l’édition Juillet-Août, qui restera en kiosque tout l’été! J’en suis toute excitée car c’est le meilleur magazine possible pour mes Victor! Il s’adresse aux 9-11 ans, exactement le public de mes livres, et est lu par les garçons autant que les filles, encore une fois comme ma série. C’est un des rares médias qui se dirige directement dans les mains de mes lecteurs plutôt que dans celle des passeurs (parents, libraires, professeurs, etc).

Je vous en reparle lorsqu’il sera en kiosque!

Les débrouillards

Plagiat, air du temps, asymptotes et désespoir

Illustration de Merlin2525 sur openclipart.orgIl y a les grands cas connus (Robinson!) et donc de grandes preuves que ça existe, mais le plagiat ne fait pas partie de mes démons personnels. Je ne m’envoie pas mes manuscrits par la poste et ne m’empêche pas de raconter mes histoires et mes idées à mes amis. Je reste (naïvement, peut-être) convaincue que le plagiat reste marginal et garde une grande confiance en la bonté et la décence humaine.

Même lorsque mise devant des preuves assez tangibles de vol de mes idées, je laisse un bénéfice du doute. Je crois au hasard, aux coïncidences, et surtout à l’air du temps qui fait que les idées peuvent jaillir dans la tête de plusieurs créateurs en même temps.

Je ne crains pas le plagiat, mais je crains l’air du temps!

Je l’ai vécu il y a quelques années, alors que, six mois après avoir terminé un manuscrit d’album, j’ai vu ma fin, originale et émouvante, défiler devant mes yeux sur le grand écran dans Toys Story 3. Le manuscrit n’est pas complètement foutu pour autant, mais il a perdu de sa force. Tout manuscrit non-publié est à la merci d’une situation similaire.

Mon angoisse n’est jamais aussi forte qu’entre le moment où un manuscrit est terminé et sa publication. Et plus ce moment est long, plus je m’inquiète.

J’ai appris cette semaine que mon album pour Boomerang, écrit à l’été 2011, serait retardé jusqu’en 2014, en répercussion de la faillite de DLM.  L’attente m’avait déjà parue interminable jusqu’au printemps 2013, première date prévue. Je m’étais faite à l’idée pour septembre 2013, deuxième date prévue, puisque la raison du retard, soit que les vendeurs désiraient ce titre pour la rentrée littéraire, me semblait plutôt encourageante. Mais là… 2014, sans même une date précise à la clé!

Je suis dans tous mes états!

Les chances que personne n’exploite un univers semblable à celui de mon livre tendent de plus en plus vers le zéro. Je glisse sur  l’asymptote du désespoir!

Le monde à l’envers

Quelque chose d’étrange est en train de se produire avec la rédaction du cinquième Victor Cordi : je suis en train de bâtir mon monde. Quoi? Ce n’était pas déjà fait? Me demanderez-vous? Oui, non, un peu!

En fait, jusqu’ici, Exégor était comme un décor de Théâtre. J’avais bâti uniquement les morceaux dont j’avais besoins, ceux que le public verrait. À l’arrière des décors ne se trouvait que la brume, sorte de « to be completed » attendant son heure.

Et c’est seulement la semaine dernière, 4 livres et demi plus tard, qu’Exégor prend enfin forme. La semaine dernière, par exemple, j’en ai tracé une première tentative de carte, ci –dessous.

Ébauche de carte d'Exégor

J’ai aussi précisé la situation géopolitique et inventé leur calendrier. Dans les prochaines semaines, je vais probablement lister les différents peuples qui y vivent. Finalement, j’aurai besoins d’un système économique avant la fin du printemps.

J’ai toujours cru que les auteurs commençaient par cette étape, mais je réalise que le monde se bâtit très bien à l’envers. Je ramasse les bribes déjà plantées au cours du premier cycle d’histoire et n’ai qu’à en nouer les ficelles pour que le tout soit cohérent.

Le pire, c’est que je m’amuse comme une petite folle! Je suis un anthropologue à la bibliothèque des cigales, mon imagination prend son pied!

Reste à voir si le lecteur prendra le sien!