La disparition de l’enfant obéissant

J’ai lu récemment un excellent classique : Little Princess, de Frances Hodgson Burnett (1905). L’auteur y met en vedette une petite fille comme on n’en trouve plus en littérature jeunesse : gentille, obéissante, généreuse, travailleuse… et complètement victime des adultes.

Les classiques sont remplis de ce type d’enfants: Cosette, Rémy sans famille, Oliver Twist, etc. Ces héros sont affligés par le malheur, maltraités par les adultes, et jamais il ne leur viendrait à l’idée de se rebeller. Ils subissent et subissent pour finalement n’être sauvés de leur misère que par un adulte plus gentil qui veut bien les adopter.

De nos jours, si, dans un roman jeunesse, des adultes décidaient de maltraiter un orphelin, ce dernier leur fausserait rapidement compagnie, ou encore leur ferait à son tour subir mille misères, façon « Home Alone ». L’obéissance n’a plus la cote! Les héros sont, au contraire, plutôt des fortes têtes qui n’ont aucun remords à braver les interdits, et qui n’ont peur d’aucun adulte, d’aucune source d’autorité.

Autant l’histoire de Little Princess est merveilleuse, autant je ne peux m’empêcher de me demander comment elle serait reçue par un enfant d’aujourd’hui. Trouveraient-ils l’héroïne, trop « neuneu » malgré sa résilience exemplaire et sa grande générosité? Mais surtout, en tant qu’auteure, je me demande : « Y a-t-il encore de la place pour l’obéissance en littérature jeunesse? »

5 réflexions sur « La disparition de l’enfant obéissant »

  1. Je pense que oui, mais il faut la présenter d’une autre façon. Un enfant de nos jours n’obéit pas « parce que c’est la règle ». Il va se poser des questions, vouloir peut-être être meilleur que les autres (et même les adultes) en respectant les règles. Il peut même être mis devant un dilemne entre deux règles et devoir alors s’interroger sur l’esprit des règles plutôt que leur lettre…

    Bref, oui, je pense qu’il y a de place pour l’obéissance. Qu’il faudrait même la valoriser davantage (Harry Potter est VRAIMENT pas un exemple pour les jeunes à ce sujet), mais sans faire des héros nunuches parce que trop gentils.

  2. @Gen: en fait, je me demande, dans le moderne, si ce ne sont pas tes héros de Hanaken qui sont venus le plus proche d’être sage. Le dilemne de ton héroïne qui doit choisir entre son devoir envers son maître et la vengeance de la famille entre exactement dans ce que tu dis. Et pour ce qui est de Harry Potter, je pensais justement en écrivant ce billet! Pas super sage!

  3. Dans un monde qui se réjouit trop souvent de la vengeance, il devrait y avoir moyen de patenter des anti-stars intéressants pour les jeunes. Vous pourriez penser à une sorte de Charlie Brown nouveau qui rêverait d’être (ou de connaître!) un travailleur de rue (ami des enseignants?) pour contrer les bullies de ce monde… euh….quelque chose du genre!

  4. Je m’étais fait la même remarque il y a 5 ans quand j’ai voulu faire découvrir la Comptesse de Ségur à ma fille. La tentative a avorté très vite quand j’ai relu les Petites filles modèles avec elle. Fin d’un fantasme où je rêvais de partager mes souvenirs d’enfance avec ma fille :-).
    Par contre, Little Princess (dans sa version livre, pas film ultra adouci) reste pour moi le symbôle de la résilience, de l’imaginaire, l’amitié… On avait déjà dans ce roman et Le jardin secret des semblants de désobéissance.
    Le plus rigolo à lire avec du recul? Le Clud des cinq et une obéissance à toute épreuve que Blyton réussit à combiner malgré tout à l’aventure :-).
    L’obéissance automatique fait place à la sagesse pondérée. Ce qui nous offre une profondeur de texte et de situations bien plus riches et des héros jeunesse confrontés à des dilemmes beaucoup plus intéressants.

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